Sous le titre "La presse quotidienne d'information: chronique d'une mort annoncée?", la commission culturelle du Sénat vient de pondre un rapport présenté par Louis de Brossia le 4 octobre dernier.
L'état des lieux n'est pas glorieux et est décrit sur le mode "tous coupables, tous responsables". Le thème de la responsabilité partagée permet aux rapporteurs sénatoriaux de balayer large tout en reprennant une antienne bien connue déjà: "Tous les titres de la presse quotidienne d'information politique et générale française doivent résoudre une équation économique délicate, caractérisée par une baisse continue des recettes et le maintien de coûts de production élevés".
BAISSE DES RECETTES ET COUTS TROP ELEVES
Equation connue donc, qui autorise la France à figurer en 31e position mondiale et au 12 e rang européen pour la diffusion des quotidiens d'information nationaux à raison d'un modeste taux de pénétration de 160 exemplaires pour 1000 habitants.
Pour les recettes, outre la perte des annonceurs séduits par la télévision (la grande distribution a profité de la libéralisation au 1er janvier de la publicité télévisuelle pour son secteur), la radio, l'internet aujourd'hui mais aussi les... quodtiens gratuits, la presse enregistre aussi une baisse de recettes liées tout simplement à ses ventes (donc à ses lecteurs-acheteurs). L'exemple de la petites annonces, cité dans le rapport, montre qu'en 1990 près de 320 millions d'euros allaient à la presse pour seulement 70 millions d'euros aujourd'hui!
QUAND LE LIVRE PROFITE, LA PRESSE TRINQUE
Les coûts eux, ont au mieux stagné... en restant encore très élevés. "Du fait des salaires individuels et des sureffectifs négociés par le syndicat du Livre" (autrement dit la CGT), soulignent nos sénateurs.
Mais ce serait un peu court comme explication, et le document en question n'omet pas de rapporter aussi la crise de la presse à l'évolution de son environnement concurrentiel:
- apparition des quotidiens gratuits d'information
- développement d'internet qui offre plus d'interactivité, plus de réactivité et plus de... gratuité
Alors la faute à qui encore?
"LE CERCLE VICIEUX DU DECLIN"
Des éditeurs, évidemment. La presse quotidienne nationale "s'est elle-même installée dans le cercle vicieux du déclin à la suite d'une succession de petites lâchetés" cite le rapport. Vous voulez des détails? Balançons donc!
1° un manque de discernement en matière de diffusion
2° un manque de courage sur le plan éditorial
3° un individualisme exacerbé
4° une obsession du court terme
Des pouvoirs publics aussi, et d'un régime d'aide économique à la presse qui relève plus du "tonneau des Danaïdes" que de la potion magique!
Des journalistes enfin. Eux aussi sont pointés comme partageant une part de responsabilité dans cette spirale de déclin. Au point que les sénateurs rapporteurs s'interrogent: finalement, est-ce que la crise de la presse ça n'est pas tout simplement la crise du journalisme? Bon, c'est un peu radical comme raccourci mais ça vaut d'être examiné. En tout cas, quand le rapport évoque en vrac, "Le poids des affaires" ou "la perte de crédibilité", il appuie là où ç a peut faire mal; quand il cite dans le même lot argumentaire "les conditions de travail dégradées", on ne parle plus de la même chose car là, à leur débours, les journalistes ne font que les subir, ce qu'on ne peut tout de même pas leur balancer comme reproche...
Prochain post: les remèdes proposés...